Myriam El Khomri chez Pôle emploi : « Bonjour, je suis la nouvelle ministre »

BE.
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Paris, le 3 septembre 2015

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EMPLOI POLITIQUE ENTREPRISES

Myriam El Khomri chez Pôle emploi : « Bonjour, je suis la nouvelle ministre »

A peine nom­mée, la rem­pla­çante de Fran­çois Reb­sa­men a vi­sité une agence Pôle em­ploi pa­ri­sienne. Un nou­veau style de com­mu­ni­ca­tion face au fléau du chô­mage. Re­por­tage.

« Bon­jour, je suis la nou­velle mi­nistre de l’Em­ploi. J’ai été nom­mée au­jour­d’hui. » Il est 16h25 et My­riam El Khomri vient de des­cendre de sa Peu­geot 508 grise pour s’en­gouf­frer dans l’agence Pôle em­ploi de l’ave­nue Ar­mand Car­rel, dans le XIXe ar­ron­dis­se­ment de Paris. Il s’est écoulé à peine trente mi­nutes entre ses pre­miers mots sur le per­ron du mi­nis­tère du Tra­vail, de l’Em­ploi, de la For­ma­tion pro­fes­sion­nelle et du Dia­logue so­cial, où elle a suc­cédé à Fran­çois Reb­sa­men, et sa vi­site au­près de l’or­ga­nisme dont elle devra com­men­ter chaque mois les sta­tis­tiques, jusque-là mo­roses.

« Tous les mois à l’an­nonce des chiffres du chô­mage, j’au­rai une pen­sée émue pour toi », lui a lancé son pré­dé­ces­seur, qui a peu goûté ces « mo­ments de so­li­tude ». Pour l’heure, My­riam El Khomri prend ses marques avec le sou­rire. Le mes­sage en­voyé est lim­pide : le chô­mage n’at­tend pas, alors la nou­velle mi­nistre n’a pas traîné avant de faire ses pre­miers pas chez Pôle em­ploi. Cou­tu­mière des dé­pla­ce­ments après un par­cours à la Mai­rie de Paris et un poste de se­cré­taire d’Etat à la Ville, son agenda res­tera chargé en vi­sites de « ter­rain ».

Son en­trée se fait par « l’es­pace nu­mé­rique » de l’agence, quelques bornes in­for­ma­tiques en libre-ser­vice. Une ving­taine de de­man­deurs d’em­ploi pa­tientent en file in­dienne der­rière les trois gui­chets d’ac­cueil. A l’ex­cep­tion d’une grappe de jour­na­listes venue im­mor­ta­li­ser les pre­miers pas de la mi­nistre à l’as­saut du chô­mage, le hall est éton­nam­ment clair­semé à une demi-heure de la fer­me­ture.

« Une agence mo­dèle »

14 000 chô­meurs de toutes ca­té­go­ries sont ins­crits dans cette agence, ex­pliquent des conseillers, mais seuls 6000 sont ef­fec­ti­ve­ment en re­cherche d’em­ploi ; les autres sont en for­ma­tion, en contrats aidés, en in­té­rim ou tra­vaillent comme in­ter­mit­tents. Ka­rine, éner­gique conseillère à l’in­dem­ni­sa­tion, ob­serve le balai des mé­dias et des proches de la mi­nistre, dont elle a ap­pris la venue une heure plus tôt. « Ici c’est une agence mo­dèle », as­sure celle qui re­ven­dique « 15 ans d’ins­ti­tu­tion » – As­se­dic puis Pôle em­ploi -, dont « plus de 5 ans » dans le XIXe ar­ron­dis­se­ment. « Les ser­vices sont bien struc­tu­rés. Chaque étage a un ma­na­ger. On n’a pas le temps de rem­plir toutes nos mis­sions, mais on ar­rive à gérer l’ur­gence », juge Ka­rine.

Der­rière elle, My­riam El Khomri tra­verse la pièce au fil des poi­gnées de mains. Chaque de­man­deur d’em­ploi placé sur son che­min a droit à quelques ques­tions ri­tuelles : « de­puis com­bien de temps vous êtes au chô­mage ? », « vous êtes en for­ma­tion ? », « vous êtes bien ac­cueillis ici ? », conclu d’un « merci et bon cou­rage ». Dans la « zone de confi­den­tia­lité » dé­li­mi­tée par un trait rouge au sol, un échange entre un chô­meur et une agent d’ac­cueil est fil­mée en gros plan par trois chaînes de té­lé­vi­sion. « Pour­quoi vous avez été radié, mon­sieur ? », lance la sa­la­riée de Pôle em­ploi à un homme d’une cin­quan­taine d’an­nées. Sa ré­ponse est in­ter­rom­pue par l’ir­rup­tion de la mi­nistre.

« Nos offres, c’est le mar­ché qui les crée »

Der­rière le gui­chet, Mo­hand tente de gar­der un oeil sur les usa­gers mal­gré la fré­né­sie am­biante. An­cien de l’ANPE, tou­jours spé­cia­lisé dans le pla­ce­ment des chô­meurs, il ne prête pas beau­coup de pou­voir au mi­nistre du Tra­vail. « Il peut ap­por­ter des bud­gets pour les contrats aidés, mais le reste de nos offres, c’est le mar­ché qui les crée. Quel est le pou­voir d’un po­li­tique pour ra­me­ner de la crois­sance ? », s’in­ter­roge-t-il. Au­jour­d’hui, Mo­hand dis­pose de 500 à 600 offres d’em­ploi dé­po­sées par des en­tre­prises, mais la plu­part, es­time-t-il, ne cor­res­pondent pas aux pro­fils des de­man­deurs d’em­ploi.

« En pé­riode de chô­mage élevé, les postes fa­ciles à pour­voir partent fa­ci­le­ment par le bouche-à-oreille, ex­plique Mo­hand. Les autres, ceux qui sont com­pli­qués à com­bler, ar­rivent chez nous, mais les gens qui pour­raient les oc­cu­per sont déjà em­bau­chés, et ce n’est pas notre bou­lot de les dé­bau­cher ! C’est comme ça que les em­ployeurs en ar­rivent à dire qu’ils ont tenté de re­cru­ter par Pôle em­ploi, mais que ça n’a pas mar­ché. » Le tra­vail de Mo­hand consiste sur­tout à en­voyer les chô­meurs en for­ma­tion, à les ré­orien­ter : « Il faut convaincre les en­tre­prises de prendre quel­qu’un qui se rap­proche du pro­fil, si l’on se charge de fi­nan­cer son adap­ta­tion. »

« Je me re­mets au tra­vail »

« Adap­ta­tion », « for­ma­tion », « mo­bi­lité »… Seules pistes concrètes évo­quées pour faire bais­ser le chô­mage, les termes ja­lonnent la vi­site de My­riam El Kho­meri. Au qua­trième étage de l’agence, une réunion s’im­pro­vise entre la nou­velle mi­nistre, des res­pon­sables de Pôle em­ploi et des re­pré­sen­tants de l’Etat. « Quel est votre bud­get de for­ma­tion ? Com­ment l’aide à la mo­bi­lité se concré­tise ? », in­ter­roge My­riam El Khomri à l’adresse du di­rec­teur d’agence. « On va les lais­ser tra­vailler à huis-clos », in­ter­rompt une char­gée de com­mu­ni­ca­tion, en train d’éva­cuer la presse vers le hall d’ac­cueil où la mi­nistre ré­ap­pa­raît une quin­zaine de mi­nutes plus tard.

Il est 17h05, l’agence vient de fer­mer ses portes et le hall d’ac­cueil s’est vidé. Les ca­mé­ras s’ins­tallent en arc-de-cercle pour cap­ter les der­niers mots de la mi­nistre, au grand dam de son ser­vice de presse qui ne vou­lait pas d’un cadre « trop so­len­nel ». « Je connais ces gens en si­tua­tion de chô­mage », as­sure My­riam El Khomri, qui, di­manche der­nier, évo­quait en­core le manque d’ac­cès à l’em­ploi dans les quar­tiers sen­sibles lors d’une in­ter­view aux Echos. Dans les pro­chains jours, elle pro­met qu’elle par­lera « aux ac­teurs de l’em­ploi mais aussi à ceux de l’en­tre­prise ». La mi­nistre est moins lo­quace sur les ques­tions qui fâchent. La ré­forme du droit du tra­vail ? « Je pren­drai connais­sance du rap­port qui nous sera remis. » Celle de l’as­su­rance-chô­mage ? « Merci, lance-t-elle en s’échap­pant, main­te­nant je vais me re­mettre au tra­vail. »

par Alexia Ey­chenne

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